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Edgars Pouzo : « Les entreprises qui réussissent sont celles qui s’adaptent le mieux à la législation locale »

La Chambre de commerce et d’industrie franco-russe a rencontré Edgars Puzo, le Directeur général de Atos en Russie, CEI et pays baltes, afin de discuter des spécificités du marché IT russe, des perspectives de l’entreprise Atos en Russie et des dernières technologies. 

– Quelles sont les tendances clés du marché IT en Russie ?

Le marché est influencé par un certain nombre de facteurs. Tout d’abord par la situation géopolitique, que tout le monde connaît parfaitement. Le deuxième facteur est la législation. S’il y a quelques années, l’industrie IT était peu régulée en Russie, aujourd’hui la législation est plus stricte. La troisième tendance est au renforcement du contrôle de l’État sur les dépenses informatiques, ainsi que l’augmentation du nombre d’entreprises informatiques locales avec participation de l’État. Le dernier point est, bien entendu, la politique gouvernementale de substitution aux importations, dans le cadre de laquelle on exige plus d’investissements de la part des entreprises étrangères, plus de produits et de services localisés, c’est-à-dire plus de valeur ajoutée sur le territoire russe.

– La réglementation de l’industrie russe est-elle plus stricte que la réglementation française?  

Si l’on parle de la protection des droits des utilisateurs, il n’y a pas beaucoup de différence. Dans le segment B2B, la régulation de chaque Etat vise logiquement à protéger les intérêts des entreprises locales. En raison de cette logique nationale, les producteurs locaux en France et en Russie sont favorisés par rapport aux entreprises étrangères. En règle générale, les entreprises étrangères les mieux adaptées à la législation et aux problématiques des autorités locales sont celles qui réussissent le mieux .

– Depuis le 1er janvier 2016, les structures étatiques prenant part aux marchés publics n’ont pas le droit d’acheter un logiciel étranger si une solution analogue russe existe. Comment cette loi a-t-elle affecté les activités de votre entreprise ?

Bien sûr, en tant qu’entreprise étrangère, nous constatons avec cette mesure la détérioration de la  concurrence ouverte, car nous sommes contraints d’évoluer dans des conditions inégalitaires par rapport aux entreprises informatiques locales. Cependant, chaque pays cherche à protéger son marché, c’est également le cas en France comme je l’ai dit. Notre tâche ici, est donc de changer rapidement et commercialement notre modèle de travail en Russie, et c’est ce à quoi nous travaillons. 

Cette loi n’était pas une surprise pour nous. Atos opère sur le marché russe depuis 26 ans et depuis longtemps nous nous efforçons de maximiser la localisation sur le territoire et de travailler avec des partenaires russes et des fournisseurs de composants locaux, etc. Cela réduit considérablement les risques liés à une entrée sur le marché local. L’année dernière, nous avons localisé les serveurs de notre marque technologique Bull et de l’équipement high-tech Unify en Russie.

– A quel point votre entreprise est-elle déjà localisée en Russie ? 

En tant qu’intégrateur de systèmes, nous sommes presque toujours localisés. Nos clients ne peuvent utiliser que des produits localisés.

Si nous participons à des appels d’offres pour des marchés publics, nous devons répondre aux critères établis par la loi. Par conséquent, nous offrons des logiciels et des infrastructures qui correspondent à la définition du registre.

– Quels sont vos projets pour l’année 2018 ? 

La croissance de notre entreprise. En octobre dernier, Atos a ouvert un département de Big Data et de sécurité en Russie. Cette année, nous allons intégrer Unify et la filiale UCC (Unified Collaboration Communication), qui développent et proposent des solutions pour le travail collaboratif et la communication. Nous allons également créer sur le marché russe une antenne de notre marque Wordline – la plus grande entreprise informatique en Europe dans le domaine des systèmes de paiement et de transaction. Nous prévoyons également de développer notre activité dans les pays de la CEI.

Malgré les risques existants, les collègues français [du siège – ndlr.] voient en Russie un grand potentiel. Ils voient que les investissements réalisés sont couronnés de succès et que les dernières technologies sortent tout aussi bien en Europe qu’en Russie. Par exemple, le lancement en 2014 de la marque française Bull (fabricant de serveurs) a été un succès. Cette année, nous allons sortir sur le marché russe une nouvelle ligne de ces serveurs, qui sont les plus produits au monde dans leur segment.

La tendance clé qui traverse le secteur est la localisation. Dans notre entreprise, ce processus a été lancé avant la substitution aux importations. Nous créons des emplois en Russie, formons des spécialistes. Cette année, nous célébrerons le 15ème anniversaire de notre centre mondial d’externalisation à Voronezh, qui compte plus de 800 employés.

De plus, nous proposons et vendons nos services à l’export.

– Vers quels pays ? 

Principalement vers l’Europe de l’Ouest : Allemagne, Suisse, Autriche, France, Belgique, Finlande, Suède. Mais nous coopérons aussi avec des entreprises américaines et japonaises.

– Sur quelles nouvelles technologies populaires pariez-vous actuellement ? 

Atos se concentre actuellement sur l’Internet des objets, l’industrie 4.0, l’intelligence artificielle, le machine learning, l’informatique quantique. Nous disposons de toutes les technologies nécessaires à la recherche scientifique dans ce domaine : des serveurs puissants, des outils pour le machine learning quantique, ainsi que notre savoir-faire. Nous avons signé un partenariat technologique avec Siemens, qui s’est élargi cette année. Notre budget commun a été augmenté de 100 millions d’euros. C’est cette coopération qui vise à développer et mettre en œuvre des solutions avancées pour nos clients.

– Quel est le rôle de l’infrastructure informatique dans la transformation numérique de l’entreprise? 

L’infrastructure est ce sur quoi repose toute l’économie numérique et son efficacité. Par exemple, tous les éléments qui assurent le fonctionnement des véhicules sans conducteur (Connected Cars) forment une infrastructure unique. Ces voitures communiquent entre elles, sur la base de données unifiées, grâce auxquelles une décision est prise quant à la direction du trafic.

Il est primordial que les décisions législatives qui affectent l’infrastructure soient prises à une échelle globale et non locale par les différents pays. Après tout, le mouvement de ces voitures ne se limite pas au territoire d’un seul pays. La même chose s’applique à d’autres infrastructures informatiques internationales.

– Depuis plusieurs années, Atos est le partenaire IT des Jeux Olympiques. En quoi consiste votre soutien ? 

La société est partenaire technologique et sponsor du CIO depuis 1992. Notre équipe a participé avec succès aux jeux à Pyeongchang, et s’est maintenant envolée vers Tokyo, où les jeux suivants auront lieu.

En tant que partenaire technologique, Atos fournit la solution Games Management System qui permet de tout gérer de A à Z : accréditation des fans, athlètes, techniciens, médecins, bénévoles, systèmes de suivi du temps, gestion des flux, etc. Nous contrôlons la façon dont les gens se déplacent, gérons l’infrastructure et les incidents, c’est-à-dire que nous voyons ce qui se passe et nous pouvons réagir rapidement. Le système peut également intégrer la fonctionnalité associée aux examens médicaux des athlètes, au transfert des passagers et à la vérification de la sécurité des supporters.

Les Jeux de Pyeongchang ont été les premiers à être gérés à distance depuis notre centre de Barcelone. C’est une véritable transition vers un nouveau format. Nous avons pris la même décision pour les Jeux de Tokyo. 

Les Jeux Olympiques ne sont que l’un des nombreux événements que nous soutenons tout au long de l’année. Nous faisons également des expositions, des Universiades, des compétitions de deuxième ligue, les Jeux asiatiques et des Jeux du Commonwealth. Notre système est universel et peut convenir à tous les formats d’événements, grands comme petits. Ainsi, l’an dernier nous avons soutenu Astana Expo 2017.

– En juillet dernier, le gouvernement a approuvé le programme « Economie numérique », qui qualifie le développement de l’industrie IT en Russie jusqu’en 2024. Votre entreprise prévoit-elle de participer à la mise en œuvre de cette stratégie?

Sans aucun doute. Je suis membre du comité Economie numérique du Syndicat russe des Industriels et Entrepreneurs, et nous surveillons activement le développement de la législation russe. Atos cherche à prendre une position active pour diffuser les meilleures pratiques européennes sur la scène mondiale. 

Dans l’Union européenne, il y a un commissaire européen en charge de l’économie numérique. J’ai eu l’occasion de la rencontrer. Notre entreprise étudie comment les choses qui fonctionnent dans l’UE peuvent fonctionner en Russie. Et c’est précisément dans ce domaine que la coopération devrait se développer en permanence, et ce malgré la situation géopolitique.

– Qui sont vos clients en Russie ? 

Notre base de clientèle est divisée en deux : les clients russes et les étrangers. Nos clients étrangers sont plus nombreux, mais les Russes représentent un plus gros volume d’activité. 

En ce qui concerne les clients étrangers, presque toutes les entreprises ont localisé leur production d’une manière ou d’une autre et sont présentes en Russie depuis longtemps. La plupart des clients étrangers sont liés à l’industrie automobile ou au secteur pharmaceutique. Les clients russes représentent plus de secteurs différents : de l’industrie à l’énergie.

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