La rencontre networking de la CCI France Russie et de la Chambre de Commerce Américaine en Russie (AmCham) a eu lieu à Moscou
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« Il ne faut pas attendre et chercher à rattraper l’Occident. Il est temps d’aller de l’avant ». Anton Dmitrakov, directeur général de l’agence de recouvrement de créances « EOS » sur la « nouvelle réalité » dans le domaine des cessions, des dettes d’entreprise, de la médiation et du recouvrement international
14.09.2020

– Anton, une question pour vous en tant que plus gros investisseur dans le rachat de dettes: pourquoi en Russie les prix des portefeuilles sont-ils moins élevés qu’en Europe? Comment les banques peuvent-elles accroître l’attractivité de leur offre auprès des acheteurs?

– Plusieurs facteurs jouent en faveur de prix plus élevés. Premièrement, la grande qualité des actifs eux-mêmes, tant au niveau de leur préparation avant la vente, des faibles délais de dépassement au moment de la vente, qu’au niveau des perspectives de recouvrement. Deuxièmement, un environnement des affaires stable pour les recouvrements. Dans les pays européens, la question de la cession des créances douteuses aux agences de recouvrement est un instrument de base de la gestion des liquidités. La cession était inscrite dans le droit romain et le recouvrement existe depuis environ 100 ans et ne fait pas l’objet de spéculations politiques à chaque cycle électoral.

– Quelles sont les composantes d’une meilleure qualité des dettes étrangères ?

– Chaque cas est complet: un dossier de crédit complet, les coordonnées du client, ainsi que, et c’est particulièrement important, un fichier contenant l’historique de l’interaction avec lui jusqu’au moment de la cession, y compris l’historique de gestion de la dette d’autres agences de recouvrement. Tout cela sous forme électronique!

Le délai de retard joue un rôle clé. En moyenne en Europe, l’âge de la dette au stade de la vente est de 180 jours et plus. Un retard de plus de 360 jours est beaucoup moins courant. Et en République tchèque, par exemple, il est généralement de 90 jours et plus. Comparé à notre marché, où l’âge des dettes est de deux ans et plus, et le dossier est souvent incomplet, la question des plaintes concernant les prix bas ne se pose plus.

L’autre composante de la qualité est l’efficacité du recouvrement. En Europe, elle est plus élevée. Pourquoi ? Dans la plupart des pays, le système des procédures d’exécution des dettes bancaires est privé ; les opérateurs privés sont plus efficaces, ainsi qu’en témoignent les statistiques. L’accès rapide aux comptes est assuré par l’ordonnance européenne de saisie des comptes. Par conséquent, l’exécuteur peut saisir les comptes du débiteur et en retirer des fonds dans n’importe quel pays de l’UE, ce qui simplifie et accélère considérablement la procédure.

– Vous avez mentionné les prêts de garantie. Les banques russes sont-elles prêtes à les vendre? Quel est notre retard sur les pays occidentaux dans ce segment des ventes ?

– Je vais commencer par la fin : nous sommes en retard. Nous accusons un retard très sérieux, même par rapport aux pays d’Europe de l’Est. La part des prêts dits Real Estate Owned, c’est-à-dire des prêts où l’immobilier est une garantie dans la structure totale des créances vendues en Europe, s’élevait en 2019 à 16%, soit 23 Md EUR ! En Russie, la part des prêts hypothécaires est inférieure à 1%, ce n’est donc même pas la peine d’évoquer les valeurs absolues.

La volonté des banques russes de suivre l’exemple de leurs collègues occidentaux n’est pas encore évidente, même si j’appelle personnellement nos banquiers à réfléchir sérieusement aux perspectives de vente dans ce segment : la part des prêts hypothécaires dans la structure totale du portefeuille de prêts est désormais de 43% et atteindra bientôt 50%.

– Vous voulez dire que la croissance de la part des prêts hypothécaires dans le portefeuille reflétera la croissance des impayés?

– Certainement. Et ce n’est ni bien, ni mal, c’est une réalité objective du marché. Il faut s’y préparer.

– Autrement dit, l’augmentation des retards dans les prêts hypothécaires conduira à une «nouvelle réalité» sur le marché des cessions?

– Cette « nouvelle réalité » arrive déjà. Il suffit de regarder nos voisins occidentaux, l’histoire de leur marché, que nous vivons avec retard. C’est pourquoi je conseillerais aux banques de former dès maintenant des offres hypothécaires. Sur les actifs à problème dont ils disposent. Il ne faut pas attendre et chercher à rattraper l’Occident. Sur la base de son expérience, nous savons déjà comment procéder. Il est temps de prendre de l’avance.

En Russie, nous avons une excellente opportunité de nous entraîner et de former une excellente expertise dans le travail avec les portefeuilles de prêts hypothécaires à toutes les étapes: formation des lots, évaluation, tarification, ventes et gestion des portefeuilles achetés auprès de nouveaux créanciers.

– Avec cette approche et l’expertise accumulée, que doivent attendre les vendeurs de la part des acheteurs?

– L’essentiel pour les vendeurs est la possibilité de gérer rapidement des réserves. Une augmentation de la part des arriérés hypothécaires dans les portefeuilles augmentera le provisionnement et la vente, au bon moment, je le souligne, d’un tel portefeuille à un prix adéquat deviendra une condition importante pour la stabilité de la banque.

En tant qu’acheteur, je ne pourrai offrir un prix adéquat aux vendeurs à l’avenir qu’après avoir reçu des «pilotes» importants maintenant. Alors commençons à façonner le marché dès aujourd’hui.

– Merci. Anton, parlons maintenant d’un autre sujet. La crise a déclenché une réaction en chaîne d’impayés dans le secteur des entreprises. Comment évaluez-vous le volume des créances douteuses dans le secteur B2B?

– Au début de l’année, Rosstat a donné des chiffres précis : 2,7 billions de roubles au 1er janvier 2020. Il est évident que d’ici la fin de l’année, le volume des créances douteuses dans le secteur b2b augmentera de manière significative. De plus, les dettes douteuses des entreprises envers les banques représentent 2,4 billions de roubles supplémentaires au 1er juin, et devront également être affrontées, en particulier dans le segment des petites et moyennes entreprises.

– Qu’est-ce que le marché du recouvrement peut-il proposer ? Quelles sont les ressources et les pratiques ?

– Gérer les créances est un travail très ingrat, cela prend du temps et engendre des coûts. En cas de présence sur un large territoire, il est souvent impensable d’avoir le nombre d’employés nécessaires dans les régions, de distraire les responsables clients expérimentés de leurs missions courantes. En période de crise, le nombre de livraisons et services non payés augmente fortement, ce qui peut achever les entreprises en l’absence d’entreprises qui se spécialisent dans le traitement de ce problème.

– C’est là que vous intervenez…

– Oui. Et nous proposons nos spécialistes : nos responsables, nos juristes, nos médiateurs. Notre principe de travail en B2B est la médiation, la négociation et la réconciliation des parties avant le procès. En effet, dans le segment B2B, très souvent, il n’y a pas de débiteurs et de créanciers sans équivoque. Généralement, tout le monde est otage de la situation, la fameuse «chaîne de non-paiements». Notre objectif est alors de parcourir toute la chaîne et de résoudre les problèmes, de trouver une solution pour tout le monde et, ce qui est très important, de préserver le potentiel de coopération pour des parties qui semblent brouillées à jamais.

– Les dettes transfrontalières relèvent-elles de votre compétence? EOS Russie fait partie d’un groupe international.

– Oui. En fait, nous sommes les seuls en Russie à pouvoir offrir de tels services à un niveau très élevé, à niveau d’experts. Nous opérons dans 26 pays et avons des partenaires locaux dans 80 autres pays. Les entreprises sont très technologiques : il existe une plateforme globale en ligne sur laquelle un dossier de dette est téléchargé et qui est transmis pour traitement dans le pays où se trouve l’entreprise débitrice. Chaque action en vue du recouvrement est enregistrée et, le cas échéant, validée par le client.

– Le 19 juillet est l’anniversaire d’EOS Russie. Quelle est aujourd’hui la place de la division russe au sein du groupe EOS ?

– 13 ans de travail en Russie … En général, on parle des standards allemands que nous mettons en œuvre dans les milieux d’affaires russes. C’est exact. Mais j’ajouterai que la division russe est devenue au fil des années l’un des projets les plus performants du Groupe. Et nous voilà, la division russe, avec notre expérience, nos processus, nos résultats, devenus exemple pour nos collègues étrangers. En tant que patriote de la Russie, cela me fait très plaisir et je fais tout ce qui dépend de moi pour cela.

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